C’est une série d’une vingtaine de photographies, qui met en évidence la dépravation des mœurs chez les jeunes filles et les garçons de N’Djaména. Comme son nom l’indique, « Coins chauds » sont des lieux de loisirs, tels que les bars dancings, les boîtes de nuit, les carrefours où se retrouvent les jeunes, pour leur plaisir. Les instants capturés en ces situations et en ces moments précis traduisent, en gros, la tendance générale d’une jeunesse qui se délecte d’alcool, de cigarettes, des plaisirs charnels, dans des contextes qui expriment à la fois l’insouciance, les précarités, les regrets de rêves inassouvis et, surtout, qui représentent une grave exposition à l’insécurité.
Cette série m’a été inspirée de la vie d’une prostituée, que j’ai connue en 1996, dans une boîte de nuit de N’Djaména. Devenue une fidèle cliente à cause de sa passion pour les photos des soirées, celle-ci m’a révélé qu’elle a réussi à acheter une parcelle de terre pour abriter sa famille, grâce aux revenus de son travail de prostituée. Malheureusement, la concession que celle-ci a pu payer a été récupérée par les services de la municipalité, parce que le terrain en question se trouverait dans une réserve de l’Etat. Comme le malheur n’arrive jamais seul, la jeune dame a été déclarée séropositive et mourra quelque temps après des suites du sida.
La mésaventure de cette dame m’a ému, au point de me disposer à m’engager à suivre de plus près les motivations, les conditions, les contextes ainsi que les risques auxquels les jeunes s’exposent dans les «coins chauds». L’ambition affichée, à travers cette série de portraits, est d’attirer l’attention des jeunes eux-mêmes et de leurs parents sur les pièges que représentent ces endroits.
Abdoulaye BARRY
