Portraits de Mopti

Dans la continuité de notre article sur l’échange entre l’ ENSAD Paris et le CAMM , nous avons sollicité l’un des rédacteurs d’ Afrique in visu (Mali), Tiécoura N’Daou, afin qu’il nous montre sa vision de Mopti.

Ce travail photographique en noir et blanc montre les premiers pas de ce photographe. Une série émouvante.

Portrait de Mopti © Tiécoura Ndaou
Portrait de Mopti © Tiécoura Ndaou
Où et dans quel cadre as-tu pris ces photographies de portraits ?

Ces images ont été réalisées à Mopti en mars 2006 pendant notre échange avec les élèves de l’ENSAD, à l’aide d’un appareil argentique Nikon FM2.

C’était la première fois que j’utilisais un appareil photo en dehors des photos de famille et quelques autres. C’était la première fois que je partais travailler avec un sujet bien déterminé.

As-tu pris ces images dans des endroits spécifiques ?

Non pas du tout, ces images se sont faites au fur et à mesure de nos promenades en ville. Comme nous étions avec des toubabs, les enfants se sont approchés de nous et j’ai donc profité de cette occasion pour faire des portraits.

Il y aussi des portraits qui ont été réalisés dans les villages peuls en allant vers Youwarou.

Tu photographies souvent « les enfants » pourquoi ?

J’adore les enfants. J’aime regarder les activités des enfants.

Nous avons étudié la psychologie, et dans le comportement des enfants il y a quelque chose d’étrange, de fascinant. Et si on pouvait être enfant éternellement, je le serais !

Je reste à observer ce qu’ils font.

En photo, cela m’intéresse de rendre leurs attitudes, leur spontanéité. Je trouve que les photos prises spontanément sont plus belles.


Cela s’oppose à la tradition photo de studio malienne…

La photo de studio n’est pas spontanée. En voulant se faire beau, on perd l’émotion alors qu’avec un enfant on arrive à la garder.

Dans ton travail, les décors sont absents, est-ce volontaire ?

Il n’y a pas de décor car je photographie sur l’instant. Je photographie dans la rue.

Cela permet qu’on ne puisse pas identifier le lieu de la prise de vue. Cela induit un questionnement du spectateur.

L’homme est l’information principale, cela permet ainsi de se focaliser sur lui.

Portrait de Mopti © Tiécoura Ndaou
Portrait de Mopti © Tiécoura Ndaou
Pourquoi t’intéresses-tu au genre du Portrait ?

J’apporte plus de considération à l’homme. J’essaie de lire les visages des gens.

Tu as de nombreux portraits pris de manière rapprochée. Cette technique de prise de vue a-t-elle une signification ?

Oui, cela permet de lire l’expression du visage et de voir si les sujets étaient agressifs ou amicaux.

Mais c’est aussi afin d’être proche d’eux. J’ai ouvert un dialogue avec eux, je leur ai expliqué mon travail ainsi les sujets ne fuient pas.

Tu as donc eu un bon accueil ?

Oui, mais je dois leur ramener leurs images lorsque je vais retourner à Mopti.

Aurais-tu pu réaliser le même sujet en couleur ?

J’apprécie les portraits en noir et blanc. L’image est plus douce en noir et blanc et les traits ressortent mieux.

Ton image avec les deux femmes qui se tressent est intrigante, comment a-t-elle été réalisée?

Cela m’intéressait de travailler sur les tresses. J’étais parti chez une amie qui tressait une copine à Mopti d’où je suis originaire.

La femme est en train de se faire tresser pour être belle et si l’image est belle cela montre la beauté de la beauté.

Portrait de Mopti © Tiécoura Ndaou
Portrait de Mopti © Tiécoura Ndaou
De plus, les tresses sont très importantes dans la tradition malienne. Quand on est jeune fille ou femme mariée, les tresses sont différentes. Tout cela a une signification.

Et l’image de la femme avec le gobelet ?

C’est ma tante, elle donnait de l’eau à son enfant. L’eau est un thème intéressant car c’est une source de vie. Dans cette image, c’est un peu une sorte de miroir car la femme est aussi source de vie.

Mais c’est surtout la lumière sur la base du gobelet qui m’a interpellé et intéressé.

Réalises-tu tes photos vers une heure spécifique ?

Non, mais j’ai essentiellement pris ces photos de 10h à 16h. J’aime ce moment de la journée, la lumière y est forte, il y a du monde dehors et les enfants sont en pause après l’école.

Tes images n’ont pas de titre, pourquoi ?

Je ne suis pas très intéressé par les titres. A chacun d’en dégager une signification qui lui correspond.

En tant que dessinateur, as-tu fait beaucoup de portraits ?

Non pas spécialement, je ne fais pas spécialement de portrait. Les gens préfèrent être photographiés plus que d’être dessinés. Galerie « Portraits » par Tiécoura N’Daou.

Toutes les images © Tiécoura N’Daou